La recherche a pour but d'analyser comment la dérégulation des transports publics urbains agit sur les modes de vie et les dynamiques de ségrégation sociale, à partir du cas de Santiago de Chili. A Santiago, les services de bus ont été dérégulés dans les années 1980, entraînant une multiplication de l'offre de petits bus jaunes qui a compté jusqu'à 350 lignes, 3500 opérateurs privés et 8000 véhicules. Parallèlement, la libéralisation du sol et la croissance urbaine ont entraîné depuis les années 1980 un étalement urbain continu accompagné d'une élévation du niveau de ségrégation. Un processus de re-régulation du secteur des transports publics est entamé avec le projet Transantiago, soit une restructuration complète du réseau de bus, avec des lignes structurantes, exploité uniquement par une dizaine d'opérateurs avec une concession. Ce nouveau système de transports publics a été mis en place en février 2007, et s'est soldé par un échec. Cet échec est localement interprété comme résultant des défauts de jeunesse du système liés à l'exploitation, du manque d'investissements dans les infrastructures, de la multiplication des changements de ligne pour les usagers et la moindre finesse du maillage. Sans nier l'importance de ces facteurs liés à l'accessibilité, nous proposons de tester trois hypothèses: H1 Le cadre de régulation des transports agit sur les modes de vie, et plus précisément sur (1) la manière qu'ont les usagers d'utiliser l'offre et les compétences qu'ils développent dans ce cadre, et (2) l'accentuation de la corrélation entre catégories sociales et utilisation des moyens de transport. H2 L'échec connu par le Transantiago doit être compris comme une conséquence de la dérégulation du secteur des transports publics, via son influence sur les modes de vie, et plus précisément les "arts de faire" que cela a suscité en matière d'utilisation des transports publics dans la population. H3 Malgré une tentative de régulation d'un secteur libéralisé, l'échec du Transantiago génère davantage d'inégalités sociales d'accès et de ségrégation d'usage des modes de transport que le système précédent. Pour tester ces trois hypothèses, une méthodologie mixte, intégrant des méthodes qualitatives et quantitatives sera mise en œuvre. Par ailleurs, en fin de recherche, nous proposons d'enrichir l'investigation par la mise en regard du cas de Santiago avec une agglomération comparable au niveau des problèmes des inégalités sociales et de la politique de transport dérégulé : Bogota en Colombie (connue pour son système de BRT Transmilenio).