Des poursuites aux faillites, la première partie de l'ouvrage passe en revue les actes qui jalonnent ce chemin de croix et leur évolution de 1980 à 1993; le dénombrement est celui des actes administratifs effectués lors du déroulement de la procédure. Les aléas récents de la conjoncture économique impriment à toutes les courbes d'évolution une forte tendance à la hausse pour ces dernières années. Les poursuites introduites par commandement de payer augmentent de plus de 17% pendant la seule année 1991. Les impôts non payés en sont l'objet une fois sur six. Les suites données à la poursuite sont révélatrices: jusqu'en 1989, à peine plus d'une continuation de poursuite sur vingt donne lieu à une commination (menace) de faillite; de 1991 à 1993, une sur quatorze. Y a-t-il moins de biens à saisir, pour que l'on ait davantage recours à la menace de faillite? Durcissement probable dû à la récession. En termes absolus, on passe de 5'905 en 1989 à 11'340 comminations de faillite en 1992: 92% d'accroissement. Dans la plupart des cas, cependant, c'est un avis de saisie qui marque la continuation de la poursuite. Parmi les différents types de saisie qui peuvent survenir, les saisies d'immeubles, même si elles ne représentent qu'un faible pourcentage parmi tous les actes de saisie, passent de 824 en 1990 à 2'525 en 1992; ce triplement est significatif du désarroi du marché immobilier et on le retrouve, avec un an de décalage, dans les ventes immobilières. On en compte 515 durant l'année 1991 et l'832 deux ans plus tard. Il n'est pas surprenant de constater que le reste du canton est beaucoup plus touché que le district de Lausanne. Précisons que tant pour les saisies que pour les ventes, le dénombrement fait par les offices ne porte pas sur les immeubles, mais sur les créances présentées en vue de leur remboursement, et qui aboutissent à une demande de saisie, puis de vente. Fin de parcours pour une créance qui n'aurait pas été remboursée au cours des étapes précédentes: le juge prononce la faillite du débiteur. Si leur nombre est resté assez stable de 1980 à 1988, entre 500 et 600, les faillites prononcées adoptent un rythme de croissance qui atteint 13% en 1989, dépasse 20% les deux années suivantes et 33% en 1992, pour se tasser en 1993. Le district de Lausanne est moins touché que le reste du canton par cette évolution. Les faillites traitées, et donc clôturées, ont suivi le mouvement. Les offices ont doublé le nombre de dossiers traités entre 1988 et 1993. Cela ne suffit pas toutefois; le nombre de faillites en cours passe de 384 à fin 1989 à l'248 le 31 décembre 1993. L'engorgement est réel, les créanciers vont devoir prendre leur mal en patience... Les faillites clôturées de 1987 à 1993 ont été l'objet d'une attention toute particulière. Un relevé de données dans les 4'939 dossiers éclaire d'un jour nouveau et inédit différents aspects des faillis et des faillites. Tout d'abord, 306 faillites qui n'en sont plus: c'est une bonne nouvelle; elles se terminent par une révocation après que les créanciers eurent été satisfaits. L'on apprend ensuite que 919 faillites concernent des sociétés. Les autres (4'020) touchent des particuliers, que ce soit dans l'exercice de leur profession pour 1'150 personnes ayant une activité indépendante ou dans le cadre de leurs affaires privées; elles sont 2'870 dans ce cas. Faillites bien particulières cependant pour 2'256 d'entre elles, puisqu'elles font suite au décès d'une personne dont la succession a été répudiée ces héritages dont personne ne veut sont bien plus fréquents à Lausanne que dans le reste du canton. Restent 614 faillites personnelles, en majorité des personnes jeunes (moins de 40 ans), 1 personne sur 3 est divorcée, près de 3 sur 4 sont des hommes... Le sexe dit fort serait-il plus faible dans la gestion de ses affaires personnelles? Parmi les causes identifiées, 2 fois sur 3, ce sont des causes personnelles: maladie, accident, problèmes familiaux, perte d'emploi. Parmi les indépendants, au nombre de 1'150 (dont 27 successions répudiées), près de la moitié exerçaient une activité dans le commerce, la restauration ou les réparations; les banques, les assurances et l'immobilier suivent avec presque 1 cas sur 5 et le bâtiment 1 cas sur 6. Les causes économiques (conjoncture, concurrence) sont avancées 1 fois sur 3, tout comme la mauvaise gestion. Dans les faillites de sociétés (919), on trouve presque autant d'entreprises du secteur "banques, assurances, immobilier" (31%) que du commerce, de la restauration et des réparations (33%). Les causes sont rarement personnelles: 1 fois sur 2 elles sont dites "économiques" et 1 fois sur 3, la mauvaise gestion est citée. Si l'on considère les 2'656 "vraies" faillites, c'est-à-dire sans les successions répudiées, plus de 3 sur 4 sont traitées en moins d'un an. Cette proportion n'a guère varié entre 1987 et 1993. Donc pas de cas bâclés, malgré l'encombrement dû à l'explosion du nombre des faillites prononcées. Economiquement, faillite est synonyme de dette, de perte, de découvert. Le traitement des dossiers, procédure juridique avant tout, n'apporte pas toute la lumière souhaitée; en effet, si le premier examen du cas ne laisse pas apparaître de biens susceptibles d'être réalisés, la procédure est suspendue et aucune donnée financière n'est établie. Près de 44% des cas (2'169) sont traités ainsi. Il reste 2'770 dossiers dont les éléments sont chiffrés; ils totalisent financièrement près d'un milliard de créances et sont bouclés avec plus de 700 millions de découvert. L'intervention des offices permet de récupérer 206 millions, et après le règlement des frais pour 15 millions, ce sont 191 millions que les créanciers peuvent se partager. Bien sûr, les créances immobilières gagées sont servies en premier: elles sont couvertes à 74% et reçoivent 134 millions. Les créances les moins bien loties sont celles de 5ème classe (crédit bancaire, impôt) qui se voient rembourser 25 millions sur un montant de 642.